Lorsque l'on sait avec quelle passion et avec quelle fougue Laure Manaudou a atteint la plus haute place au palmarès de l'Histoire de la natation française, on a peine à croire qu'elle n'aimait guère fréquenter les piscines publiques durant son enfance. Mais ses parents, une mère d'origine néerlandaise excellente joueuse de badminton, et un père joueur et entraîneur de handball, étaient trop convaincus des bienfaits de la pratique des sports sur la santé mentale et physique de leurs enfants, pour ne pas les initier très tôt à des activités comme l'apprentissage de la natation.
C'est ainsi que dès l'âge de six ans, Laure se retrouva dans l'eau à essayer de nager comme les poissons... Jusqu'à l'adolescence (13 ans) c'était sans enthousiasme et presqu'à reculons qu'elle poursuivait ses cours "aquatiques". Jusqu'à ce qu'elle attrape le "virus" de la compétition. Cet aiguillon de la compétition, s'incarnera en un entraîneur qui deviendra lui-même célèbre : Philippe Lucas. Ayant vu, d'un coup d'oeil clairvoyant, tout le potentiel athlétique de la jeune fille, Lucas promet à ses parents d'en faire une championne de natation. Ils donnent leur accord. Avec un programme d'entraînement très exigeant et sévère, Lucas ne mettra guère de temps à développer la puissance "hydro-électrisante" de sa jeune élève, déjà favorisée par une bonne génétique et une volonté très forte.
Les succès, en compétition, commenceront d'abord chez les juniors puis, dès 2001, Laure s'affirme parmi les nageuses seniors. Et quels succès ! Manaudou accumulera les titres et les médailles à un rythme d'enfer. Jusqu'en 2009, elle accrochera 127 médailles à son cou, dont 86 en or, et elle enlèvera pas moins de 52 titres, un record en France dans sa discipline sportive. Au passage, celle que l'on surnomme désormais "L'OR" Manaudou, fracasse l'incroyable total de 89 records lors des différentes épreuves auxquelles elle prend part. Phénoménal et ahurissant ! À partir de 2004, la championne devient quasiment imbattable. La même année, aux Jeux Olympiques d'Athènes, elle devient la première nageuse française de l'Histoire à décrocher l'or. La couronne de lauriers remise aux championnes olympiques lui va très bien.
Entre 2005 et 2007, trois autres titres mondiaux viennent s'ajouter à ses trois médailles olympiques. En 2006, au 400 mètres nage libre, elle bat un record vieux de près de vingt ans. Elle battra elle-même son propre record plus tard. C'est la gloire. La France l'adore. C'est l'idole des jeunes, en particulier. Elle est au sommet de sa carrière. En 2007, "l'Or" est élue nageuse de l'année par le prestigieux mensuel américain SWIMMING WORLD MAGAZINE. Encore une première pour une Française. Les honneurs pleuvent : parmi les plus importantes récompenses, notons le Grand Prix Olympique de l'Académie des Sports, le Prix du Patriotisme Maurice Schumann, et la Légion d'Honneur.
Comme si ce n'était pas assez, Laure Manaudou est belle et souriante. Ce qui lui attire les faveurs de nombreux commanditaires qui la veulent tous pour promouvoir leurs produits. Pour la seule année 2007, on estime ses revenus de publicité à 2,8 millions d'euros. Déjà en 2005, sa grande popularité lui avait permise de lancer sur le marché sa propre collection de vêtements CATCH ME IF YOU CAN. La splendide ahtlète trône également au sommet du palmarès des femmes les plus sexy des magazines masculins. Tout le monde est fou de Manaudou !
Mais cette fameuse année 2007 marquera pourtant le début de la fin pour la glorieuse carrière de la bien nommée "L'OR". Certes, elle a récolté les fruits de son dur entraînement sous la gouverne de Philippe Lucas. Mais les dizaines de kilomètres de longueurs de piscine qu'elle accumule à chaque semaine d'entraînement, les régimes alimentaires très stricts, la discipline qu'elle s'impose en sacrifiant une grande partie de son adolescence, l'attention des médias et des paparazzis, finissent par l'écraser sous une pression qu'elle déteste de plus en plus. Une douleur persistante à une épaule, une fracture à un orteil, et des maux de tête alarmants viennent également l'ennuyer.
Par surcroît, sa concentration est affectée par une histoire d'amour passionnée avec le nageur italien Luca Marin, qu'elle appelle l'homme de sa vie. Dans la paume de sa main, la sirène dorée des bassins de natation a écrit le mot LOVE. Elle exhibe son message d'amour, dans la piscine, après chaque victoire, en voulant montrer son bonheur au monde entier.
Au même moment, en ayant assez des méthodes rigoureuses et épuisantes de Lucas, Laure décide de changer d'entraîneur et part pour l'Italie afin de se rapprocher de son amant. Son désir de s'entraîner là-bas suscite une controverse en France. Même les autorités italiennes hésitent à donner leur permission avant de finalement l'accorder. Mais cette relation amoureuse intense avec Marin tourne bientôt au vinaigre. Un jour, près de la piscine où les deux amoureux s'entraînent, une dispute éclate et c'est la rupture. Marin redemande à Laure la bague qu'il lui avait donnée en signe de leur amour. Furieuse, la championne lance le bijou dans la piscine et s'en va. Pour ajouter l'insulte à l'injure, Marin ne tarde pas à séduire une nageuse italienne, une rivale de Manaudou qui s'entraîne dans le même bassin qu'elle ! On le devine aisément, ce petit manège ne durera pas longtemps. Laure rentre en France.
Une surprise de taille l'attend. Des photos où elle apparaît complètement nue, circulent sur le web. Laure soupçonne son ex-amoureux d'être à l'origine de cet outrage. Marin niera tout. Cela n'empêchera pas la nageuse d'être profondément blessée et humiliée. Une autre histoire d'amour, celle-là avec Benjamin Stasiulis, se terminera de façon malheureuse. Amère, Manaudou se rend compte qu'on essaie d'abuser ou de profiter d'elle. Elle jure qu'elle ne se laissera plus avoir.
Préparant les Jeux Olympiques de 2008 à Pékin, la jeune femme ne connaît pas seulement l'instabilité dans sa vie affective. Elle change souvent de clubs de natation et les entraîneurs (Paolo Penso, Lionel Horter, et même son frère) se succèdent. Tous ces remous ne produisent rien de bon. À Pékin, Laure frappe le "mur" et s'effondre. Elle termine la finale au dernier rang. Les yeux rougis, elle cherche le réconfort de ses parents dans les estrades. Elle retourne chez elle bredouille et en pleurs.
Elle gagnera quelques médailles par la suite, mais le ressort est brisé. Démotivée, elle sent bien que le coeur n'y est plus et qu'elle a atteint un point de saturation face à la compétition. Au début de 2009, elle annonce qu'elle prend une pause dans sa carrière. En septembre de la même année, sa décision est prise : elle prend sa retraite à l'âge de 22 ans. "J'ai tous les titres", dit-elle. "J'ai eu tout ce que je voulais, même plus que dans mes rêves". Elle a perdu le plaisir de nager.
Laure a bien mûri sa décision et elle ne regrette rien, malgré les sacrifices énormes qu'elle s'est imposés. Elle est reconnaissante envers ses parents qui ont dû insister pour qu'elle n'abandonne pas la natation quand elle était une enfant et qu'elle n'aimait guère ce sport.
Entre temps, en octobre 2008, la jeune héroïne des Français a eu un coup de foudre pour un compatriote, le nageur Frédérick Bousquet (photo). Un an plus tard elle est enceinte de lui et donnera naissance à une petite fille (Manon) le 2 avril 2010. Une surprise ? Pas tant que ça... Très tôt, Manaudou avait fait part de son projet d'avoir des enfants à un jeune âge. C'était une priorité pour elle. Ce désir l'a aidé à prendre la décision de tourner la page sur sa carrière d'athlète de haut niveau.
Paradoxalement, cet amour a eu pour effet de relancer la carrière de Bousquet. Il a battu un record au 50 mètres et il a remporté trois médailles aux mondiaux de Rome en 2009. Enfant de deux champions, la petite Manon suivra-t-elle la trace de ses célèbres parents ? Laure a déjà déclaré qu'elle laissera sa fille libre de faire ce qu'elle veut comme carrière. Consciente du lourd prix à payer pour faire partie de l'élite sportive, la nouvelle maman ne poussera pas Manon à entrer dans ce monde difficile de la rivalité entre athlètes de haut niveau. En attendant, la jeune retraitée a visiblement beaucoup de plaisir à encourager son homme durant ses compétitions. Sachant intimement ce que son amoureux vit lorsqu'il affronte le stress des épreuves de natation, Laure est plus en mesure de le soutenir et sait lui dire les bons mots dans la victoire comme dans la défaite. Une belle complicité unit les deux tourtereaux.
Laure Manaudou aimerait réorienter sa carrière vers la profession de décoratrice d'intérieur, à moins qu'elle décide de consacrer ses énergies au cinéma. Elle a déjà joué dans deux films et participera bientôt à un troisième en compagnie de son conjoint. Pour le montage audio-visuel (ci-dessous) j'ai pensé à la superbe chanson de Corneille, TOO MUCH OF EVERYTHING. C'est un peu comme si le Fred de Laure faisait une déclaration d'amour à sa super woman. Dans son texte, Corneille parle d'une super femme qui peut sembler trop parfaite pour lui, mais que lui seul peut comprendre et aimer vraiment. Ce faisant, il se surpasse et parvient à s'élever pour s'approcher du niveau de perfection de son amante. Une bien belle histoire qui s'harmonise à celle d'une fabuleuse reine de la natation.